L’appel des chefs traditionnels du Grand Adakpamé, tenu mardi dernier sur le terrain de Dangbuipé (Golfe 1), continue de faire réagir vivement les internautes togolais. En affirmant leur opposition à toute manifestation « non autorisée » sur leur territoire, ces dignitaires ont suscité un débat intense sur la liberté d’expression, la légitimité des autorités traditionnelles et la place des manifestations dans une république.

Une position ferme des chefs traditionnels pour la paix et la légalité


Réunis en conseil, les chefs traditionnels du Grand Adakpamé ont réaffirmé leur attachement à « la paix, la cohésion sociale et au respect des institutions de la République ». Tout en reconnaissant le droit de manifester, ils ont insisté pour que ce droit soit exercé dans le cadre légal, c’est-à-dire avec une autorisation préalable.

« Faire une manifestation non autorisée à Adakpamé, nous n’allons pas accepter », a déclaré Togbui Adjikou Lanklivi 1er, chef coutumier. Les chefs ont même lancé un avertissement clair : « Toute personne résidant sur le territoire du Grand Adakpamé et désireuse de participer à des manifestations non autorisées est priée de le faire sur son territoire d’origine. »

Ce message, présenté comme un appel à la responsabilité et à la préservation de la paix locale, vise à prévenir les troubles et à garantir la sécurité des habitants.

Une vive contestation sur les réseaux sociaux


Cependant, cette prise de position n’a pas été bien accueillie par une partie de la population, notamment sur les réseaux sociaux. Sur Facebook, les critiques fusent, dénonçant un message perçu comme une atteinte à la liberté d’expression et un retour au tribalisme.

« Nous sommes dans une république. Adakpamé n’est pas un territoire conquis par ces chefs nommés par RPT UNIR. Non au tribalisme », écrit un internaute, soulignant le rejet d’une autorité traditionnelle jugée politisée. Un autre commentaire ironise : « S’ils peuvent être fermes comme ça face à l’inondation… », en référence aux problèmes d’infrastructures persistants dans le quartier.

Les critiques ciblent aussi le traitement réservé à l’artiste Aamron, arrêté fin mai pour avoir critiqué le gouvernement. Certains internautes évoquent même l’internement psychiatrique controversé du rappeur à Zébé, dénonçant une répression des voix dissidentes.

Un contexte social tendu à l’approche de nouvelles manifestations


Dans un climat déjà marqué par des tensions sociales, avec plusieurs manifestations annoncées pour les 23, 26, 27 et 28 juin, le message des chefs traditionnels est perçu par certains comme une tentative de museler l’expression citoyenne. Alors que les autorités appellent au respect de la loi et à la paix, la population reste divisée entre la volonté de stabilité et le besoin d’exprimer ses revendications.

Ce débat soulève des questions fondamentales sur le rôle des chefs traditionnels dans une république moderne, la légitimité des restrictions sur les manifestations et la manière dont les autorités peuvent concilier sécurité et liberté d’expression.