Un nouveau chapitre s’ouvre à la Banque africaine de développement (BAD). Sidi Ould Tah, technocrate chevronné et ancien ministre mauritanien, a été élu président de l’institution panafricaine à l’issue d’un scrutin exigeant, organisé en marge des Assemblées annuelles de la Banque. Il succède ainsi à Akinwumi Adesina, après dix années de mandat marqué par une montée en puissance de l’institution.
Le 29 mai dernier, le Conseil des gouverneurs de la BAD, qui rassemble les représentants des 81 États membres, a opté pour un profil d’équilibre et d’expérience. Sidi Ould Tah a remporté l’élection avec plus de 76 % des voix, au terme de trois tours décisifs. Il devance notamment le Zambien Samuel Munzele Maimbo, ancien cadre de la Banque mondiale. C’est une première pour la Mauritanie, qui voit l’un de ses ressortissants accéder à la tête d’une institution continentale majeure.
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Le parcours de Sidi Ould Tah explique en partie ce choix. Âgé de 64 ans, il est reconnu pour sa rigueur et sa connaissance fine des mécanismes de financement du développement. À la direction de la Banque arabe pour le développement économique en Afrique (BADEA) depuis 2015, il a orienté l’action de cette institution vers des secteurs stratégiques comme l’agriculture, l’eau ou encore l’énergie. Son profil allie légitimité politique et maîtrise des enjeux techniques, un équilibre précieux dans une organisation où se croisent logiques financières et volontés politiques.

Ce mandat, qui débute officiellement en septembre 2025, s’annonce complexe. Le nouveau président hérite d’une institution renforcée, mais confrontée à des défis majeurs. La BAD est aujourd’hui appelée à jouer un rôle central dans la transition énergétique du continent, l’adaptation au changement climatique, et le développement d’infrastructures durables. Elle doit aussi répondre aux tensions financières croissantes, face à l’endettement des États et à la raréfaction des ressources extérieures.
L’ancien président, Akinwumi Adesina, a laissé un héritage important : initiatives innovantes comme le programme « High 5 », soutien à la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), et augmentation historique du capital de la Banque en 2019. Mais l’environnement économique a évolué. La BAD doit désormais convaincre ses partenaires internationaux d’intensifier leur appui financier, tout en gardant le cap sur les priorités africaines.
Sidi Ould Tah devra donc conjuguer prudence budgétaire et ambition stratégique. Sa capacité à dialoguer avec des bailleurs aussi variés que la Chine, les États-Unis ou les pays du Golfe sera déterminante. Il lui faudra aussi inspirer et diriger une administration forte de plus de 2 000 agents, répartis entre le siège d’Abidjan et les représentations régionales.
